Les actualités du 4 avril 1909

La planète mars se meurt !

La planète Mars notre rouge voisine, est en train de mourir...C'est du moins la sensationnelle nouvelle que vient de publier un astronome américain, M. Percival Lowell, qui, depuis près de quinze ans, étudie Mars eu son observatoire de Flagstaff, installé à 2.200 mètres d'altitude, dans l'Arizona. Ses travaux l'ont convaincu que Mars est une planète encore vivante, encore pourvue d'êtres vivants. Mais elle agonise et "cette agonie, dit M. Lowell, nous lait présager ce que sera celle de la terre".

A chaque printemps marsien les brillantes calottes polaires qui semblent, comme celles de la terre, faites de glace et de neige, se mettent à fondre. Dès que cette fusion des calottes polaires commence, les astronomes voient apparaître sur le disque de Mars une série de lignes droites, se dirigeant vers l'équateur. Ces lignes s'allongent, se coupent, franchissent l'équateur. viennent croiser un autre réseau parti de l'autre pôle. Ce sont les canaux de Mars. Canaux simples, canaux doubles, les savants ne peuvent point affirmer si ce sont dés canaux d'irrigation ou simplement des vallées peu profondes, qui ne deviennent visibles que parce que, à mesure que l'eau y entre, la végétation s'y développe. Mais ce qu'ils affirment, c'est que, chaque année, l'eau coule moins abondamment dans les canaux et les vallées... Mars se dessèche — voilà le fait ! Mars n'a ni nuages, ni brouillard, et peu de pluies. Heureux Mars !...

Nous avons des raisons de penser, dit M. Lowell, que Mars est beaucoup plus avancé en âge que la Terre. Or une planète doit perdre graduellement l'eau de sa surface, se combinant chimiquement en pénétrant dans l'intérieur. Ainsi, à mesure que les océans se retirent, l'évaporation doit diminuer, et les pluies doivent devenir moins abondantes. L'eau disponible devient de plus en plus rare et le dessèchement de Mars est très avancé. Les cinq huitièmes de sa surface sont un désert aride que n'arrose jamais une ondée, que n'abrite jamais un nuage. Pour M. Lowell, Mars est donc à une époque, de transition entre la phase de vie comme celle de la Terre et la phase de mort comme celle de la Lune. Prophétie peu favorable, M. Lowell soutient que la Terre aussi, après avoir subi les angoisses de Mars, finira par mourir et qu'a l'instar de la Lune notre globe roulera silencieux et sans vie dans les espaces stellaires.

Les hypothèses de M. Lowell, nous dit M. Bigourdan, de l'Observatoire de Paris, me semblent quelque peu hardies et je ne puis m'associer a ses conclusions. En réalité, des observations faites sur Mars, nous ne pouvons avoir qu'une certitude : c'est que dans l'atmosphère de la planète il y a de la vapeur d'eau. Janssen, le premier, la découvrit au spectroscope. On a constaté également que l'atmosphère de Mars était rarement obscurcie par des nuages, mais ceci ne prouve point que la vapeur d'eau y soit en quantité insuffisante. Sur les canaux, nos données sont insuffisantes. Végétations, canaux d'irrigation, nous ne le savons pas. Nous ne pouvons même pas affirmer scientifiquement que ces canaux existent.Quant à la disparition de l'eau, qui chimiquement se combine avec le sol, c'est un fait d'expérience. Il est évident que sur terre l'eau diminue.Des contrées autrefois fertiles, la Chaldée, l'Algérie, la Tunisie, sont aujourd'hui beaucoup plus arides. Personne cependant ne peut dire quelle sera la fin de Mars ou la fin de la Terre.

Que Mars, nous dit M. Camille Flammarion, soit actuellement le siège de la vie, c'est ce dont témoignent toutes les observations. Mais il nous est encore impossible de nous former aucune idée judicieuse sur les formes que cette vie a pu revêtir. Quant à la mort de Mars, si les astronomes peuvent la prédire, nul ne peut dire quand elle se produira. Ce ne sera point cependant pour la Terre, comme pour Mars avant quelques millions d'années.

Le Matin – 4 avril 1909

Un savant va tenter de communiquer avec Mars !