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15 juillet 2009

Les actualités du 15 juillet 1909

La revue du 14 juillet

1910

revue 14 juillet dirigeables

C'est par un beau temps que les Parisiens ont célébré la fête nationale. Pour la première fois depuis de longues semaines, la journée s'est passée sans pluie et la température est restée douce à souhait. Aussi l'affluence des curieux à la revue fût elle rarement plus considérable.

Dès les premières heures du jour, malgré les nuages qui roulaient dans un ciel encore menaçant, la foule se dirigeait vers Longchamp. Les trains, les omnibus, les tramways étaient pris d'assaut; mais la plupart des amateurs de spectacles militaires avaient renoncé à ces moyens de locomotion, et ils s'en allaient bravement à pied, les bras chargés de provisions, à travers le bois de Boulogne et sur les routes lavées par les pluies de ces jours derniers. Les tribunes et les enceintes réservées se garnissaient rapidement. A sept heures, il n'y avait plus une chaise libre, plus une place inoccupée, et les porteurs de cartes d'entrée continuaient d'arriver.

Cependant la foule s'est amassée autour des barrières du champ de courses. Du coté de Bagatelle et du côté de Passy, elle se presse en rangs serrés qui s'épaississent à vue d'oeil. Vers sept heures et demie, le ciel s'éclaircit quelque peu; les rayons du soleil qui ne sont plus tamisés que par une brume légère, font étinceler les casques et briller les uniformes.

Dès sept heures du matin, par un temps gris, cavaliers, fantassins, artilleurs, débouchent de toutes les avenues sur le terrain de Longchamp pour prendre leur place dans la revue. C'est d'un pittoresque charmant que de voir tous ces uniformes divers se mouvoir dans la plaine, dans ce cadre majestueux de verdure. Des mouvements silencieux, sans à-coups, permettent de constater qu'on a devant soi des troupes manœuvrières et bien disciplinées.

Un peu avant huit heures, elles sont rangées sur trois lignes dans un alignement impeccable. En première ligne, le général Feldmann avec les écoles militaires et les troupes spéciales : garde républicaine, sapeurs-pompiers, génie, télégraphistes, chasseurs et zouaves; en seconde ligne, les généraux Bolgert, Chapel et Faurie avec la brigade coloniale, les 6e, 7e et 10e divisions d'infanterie; enfin en troisième ligne, les généraux Dubois et Silvestre avec les cuirassiers, les dragons, la garde républicaine à cheval et les artilleurs.

14 juillet dragons

Huit heures. Le canon du Mont-Valérien tonne, la sonnerie de "Aux champs" retentit. La daumont présidentielle, que les cuirassiers avaient escortée depuis l'Elysée fait son apparition sur l'hippodrome; M. Fallieres a à côté de lui le président du conseil, et en face M. Ramondou et le capitaine de frégate Laugier. L'équipage se dirige vers les premiers rangs de l'infanterie. Le chef de l'Etat passe rapidement devant le front des troupes. Les musiques jouent la Marseillaise, les drapeaux s'inclinent. Le ministre de la guerre et le gouverneur de Paris escortent la voiture présidentielle; derrière, suivent les officiers étrangers.

Dans l'état-major du ministre de la guerre, on a remarqué un jeune cheik arabe sur son cheval richement caparaçonné. Après avoir défilé entre les trois lignes, la daumont revient vers la tribune officielle, où se trouvent déjà les présidents des deux Chambres, tous les ministres et sous-secrétaires d'Etat, le corps diplomatique et tous les personnages officiels. Les députés ottomans, eux, occupent des places réservées dans les tribunes du Parlement.

Le président de la République met pied a terre, puis, accompagné du ministre de la guerre, il remet avec le cérémonial d'usage les décorations décernées a l'occasion de la Fête nationale aux officiers généraux. Le généralissime de Lacroix, qui le mois prochain va être atteint par la limite d'âge, reçoit le grand-cordon de la Légion d'honneur, ainsi que l'intendant général Thoumazou.Dès que la cérémonie des décorations est terminée, les troupes, qui se sont massées vers le fond de l'hippodrome, commencent les mouvements pour le défilé.

Le ministre de la guerre, suivi du général Dalstein, passe en tête et salue le président de l'épée. A ce moment, son cheval devient nerveux, difficile; il y a une minute d'angoisse dans la foule, lorsque le général Picquart tombe a terre, son épée à la main. Ce n'est rien heureusement, et le général remonte en selle. Voici ce qui s'est passé : effrayé par une tache blanche faite au milieu du gazon par le trou dans lequel on avait fiché un jalon d'alignement pour les troupes, le cheval a bondi brusquement au moment où le général voulait lui faire opérer une conversion à droite et sur place pour aller se mettre en face de la tribune présidentielle.

Mais voici les troupes qui s'avancent par bataillons en masse. Sans entrer dans les détails, il suffit de dire que le défilé a été parfait a tous les points de vue, et pour tout le monde. Nos écoles militaires ont été acclamées; chasseurs à pied, zouaves, entraînés aux sons rapides de la Marche de Sidi-Brahim, ont passé avec un sentiment de fierté, qui a été beaucoup remarqué; le Chant du Départ, a cadence vive, a entraîné aussi nos braves lignards qui ont été superbes d'entrain; les marsouins, dont on oublie quelquefois les qualités de courage et d'énergie qu'ils montrent à toute heure dans des climats lointains et meurtriers, ont soulevé des applaudissements; les sapeurs-pompiers, héros de chaque instant, seront toujours les enfants chéris des Parisiens; enfin, le génie et les aérostiers ont eu leur part de bravos.

14 juillet artillerie

Les mitrailleuses qui suivent les corps de troupe obtiennent un grand succès de curiosité. L'artillerie s'avance au trot, les quatre régiments dans un ordre et un alignement parfaits; on a beaucoup remarqué les deux conversions quelle a opérées après son passage devant les tribunes. Véritablement, c'est une arme remarquable. Enfin, la cavalerie a montré sa fougue et son entrain, deux qualités maîtresses qui plaisent tant au caractère français. La charge finale, qui impressionne toujours les spectateurs très friands de cette mise en scène, a valu à nos excellents cavaliers et à nos officiers une ovation bien méritée.

La revue d'hier a été une des plus belles que nous ayons eue depuis longtemps. Favorisée par un temps couvert, un vrai temps de revue, on a pu admirer à loisir le spectacle merveilleux, extraordinaire, qui se déroulait dans les airs. Deux dirigeables, République, venant de Chalais-Meudon, Ville-de-Nancy, venant de Sartrouville; évoluaient pendant le défilé des troupes avec une aisance remarquable. Ville-de-Nancy, surtout, était étonnant; il se jouait dans le ciel, tel un immense oiseau, accélérant, diminuant sa vitesse à volonté, tantôt au-dessus, tantôt au-dessous du République, piquant droit sur les tribunes ou se retirant ensuite par un mouvement gracieux qui ne sentait aucun effort. Il y aura bientôt quelque chose de changé dans l'art de la guerre; il faudra penser, et sérieusement, à la tactique aérienne, disait-on hier dans le monde militaire.

En résumé, notre armée a laissé hier une grande impression de force et de grandeur. Des frissons passagers d'indiscipline qui l'avaient secouée il y a quelque temps, se sont évanouis. Mais n'oublions pas que la guerre moderne a de telles exigences que pour s'y tenir prête, l'armée n'a pas trop de toute son intelligence et de tout son temps; méditons les paroles du général Hoche, ce fier républicain : La discipline s'établit et se maintient par le travail... Les armées qui n'ont pas de discipline sont toujours battues.

Le Temps – 15 juillet 1909

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Commentaires
G
Bonjour,<br /> <br /> <br /> <br /> Je souhaiterais savoir si vous auriez une ou des photos illustrant la revue de Longchamp du 14 juillet 1900 à Paris ?<br /> <br /> <br /> <br /> Merci,
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