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12 mars 2010

Les actualités du 12 mars 1910

autriche-hongrie Autriche – Le procès Hofrichter

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Vienne, 8 mars 1910 - Une affaire criminelle qui tient l'opinion publique en haleine depuis des mois, qui a provoqué des polémiques passionnées dans les journaux, le procès intenté par l'autorité militaire au lieutenant d'infanterie Hofrichter est sur le point d'être résolue et de l'être dans le sens de la culpabilité du prévenu. Le lieutenant Hofrichter était accusé d'avoir, par jalousie, essayé d'empoisonner ceux de ses camarades de l'école de guerre qui, à la suite d'examens satisfaisants. avaient été attachés à l'état-major de l'armée. Lui-même, Hofrichter, n'avait obtenu à ces examens qu'une place, dans le classement général, trop éloignée pour faire une carrière militaire brillante et rapide; il avait été renvoyé à un régiment en garnison à Linz.

Or, un jour, un de ses camarades plus heureux, le lieutenant d'état-major Mader avait été trouvé mort chez lui, et l'instruction ouverte immédiatement prouva que, quelques instants avant la catastrophe, le malheureux jeune homme avait eu l'imprudence d'avaler une pilule dont les propriétés et le but apparent sont suffisamment déterminées pour le lecteur si nous la qualifions de "pilule d'Hercule".

Ce médicament spécial avait été adressé au lieutenant Mader par la poste, dans une petite boîte en carton, accompagnée d'une réclame pharmaceutique autocopiée: l'analyse révéla qu'elle contenait du cyanure de potassium. L'écriture de la réclame était analogue à celle dont se servent les officiers pour dresser les cartes d'état-major, et certaines particularités d'orthographe, la forme de quelques lettres firent immédiatement porter les soupçons sur le lieutenant Hofrichter.

Le prévenu montra beaucoup de sang-froid, au moment de son arrestation, nia tout, et bien que des présomptions fort graves pesassent sur lui, expliqua, tant bien que mal, les faits qui semblaient l'incriminer. L'opinion se prononça en faveur du lieutenant Hofrichter, d'autant plus facilement qu'on ne trouvait pas de raison plausible de la part d'un officier pour un crime aussi odieux et que plusieurs de ses supérieurs lui avaient, jusque-là, manifesté de l'estime et de la confiance.

Le Code de justice militaire, actuellement encore en vigueur - il doit être bientôt abrogé - admettant l'instruction secrète et ne donnant pas d'avocat aux prévenus, bien des gens étaient disposés à considérer le lieutenant Hofrichter comme la victime malheureuse d'une série de circonstances des plus fâcheuses. On avait trouvé chez lui des boites pareilles à celle qui avait été adressée au lieutenant Mader, on avait également trouvé des cachets identiques à celui qui avait renfermé les pilules "d'Hercule ", dont deux avaient été retrouvées sur la table de la victime. Hofrichter prétendit que les boîtes d'ailleurs rares dans le commerce-devaient servir à fabriquer une sorte de petit nécessaire de couture qu'il destinait à sa femme; les cachets étaient destinés, disait-il, à faire avaler un médicament à son chien atteint du ver solitaire.

Tout cela était plausible. Comment supposer qu'un officier ait voulu la mort de ses camarades. Aurait-il été guidé par la jalousie, par l'ambition peut-être? Supprimer des officiers d'état-major pour créer des vides et rendre ainsi possible un avancement monstrueux. Cette explication paraissait d'autant plus invraisemblable que les règlements actuels ne permettaient pas au lieutenant Hofrichter d'être appelé ultérieurement à l'état-major, après avoir été versé dans un régiment. Restait la jalousie mais le mobile était si grossier, si indigne d'un homme cultivé qu'on se refusait généralement à l'admettre. On espérait que l'innocence du prévenu finirait par éclater au grand jour; on l'espérait, bien que sept autres officiers d'état-major eussent reçu des envois analogues à celui du lieutenant Mader, sept officiers appartenant à la même promotion

Toutes ces espérances viennent d'être réduites à néant Le lieutenant Hofrichter a cherché à communiquer avec sa famille, de la prison militaire où il est incarcéré. Ses lettres ont été toutes interceptées ce qui était facile à prévoir et elles contiennent des charges accablantes. Le prévenu y indique dans quel sens doivent être faites les dépositions de ses parents "pour qu'elles concordent avec les siennes". Il demande que certains objets compromettants, des vêtements civils, entre autres, soient supprimés. Il insiste, enfin, pour qu'un de ces oncles, pharmacien de profession en Silésie chez lequel on avait constaté une disparition inexpliquée de cyanure de potassium garde un silence complet devant la justice militaire. Ainsi se trouve établi un point, jusque-là incertain, celui de la provenance du poison. La culpabilité se trouve donc établie aussi nettement qu'elle peut l'être.

L'instruction sera définitivement close lorsque les autorités médicales auront fait leur rapport sur l'état mental de Hofrichter. Le procès, qui sera des plus passionnants, commencera vraisemblablement après Pâques Hofrichter aura à répondre devant ses juges de tentative de meurtre contre sept de ses camarades et de l'assassinat d'un huitième.

Le Figaro – 12 mars 1910


EN BREF

Naufrage du Général Chanzy - Funèbre retour - Marseille, 11 mars. Le paquebot Calvados, de la Compagnie transatlantique, qui avait été envoyé sur les lieux de la catastrophe du Général-Chanzy est rentré cet après-midi à Marseille. Il ramenait, de sa triste croisière aux îles Baléares, neuf cercueils, contenant les dépouilles mortelles de victimes identifiées le commandant Cayol, le docteur Cattaneï, médecin du Général-Chanzy Mlle Weil, de Molsheim (Alsace) MM. Halouze, de Paris; Monier, d'Oran Mlle Femeliaux, fille du lieutenant Femeliaux; Mme Audibert, de Six-Fours (Var) M. Hammers, originaire d'Alsace, et Mme, Crespel, femme de chambre à bord du paquebot. Ils avaient été placés dans le faux-pont du Calvados, transformé en chapelle ardente. Une foule nombreuse et profondément émue était massée sur les quais du bassin de la Joliette, et, dès que le bâtiment entra dans le port, tous les navires qui étaient ancrés, ainsi que les Compagnies de navigation, mirent leur drapeau en berne. A l'appontement de la Compagnie Transatlantique, sous le hangar, avait été installée une-chapelle ardente; Au milieu, se dressait un catafalque entouré d'une garde d'honneur. Les cercueils y furent placés, à l'exception de celui de M. Monier, qui doit être transporté à Oran, lieu de l'inhumation. Cette cérémonie eut lieu en présence de plusieurs représentants de la Compagnie transatlantique. Le cercueil qui contenait les restes mortels de M. Hammers fut transporté directement au cimetière Saint-Pierre, suivant la volonté exprimée par la famille. Les obsèques solennelles des victimes auront lieu demain, à deux heures et demie de l'après-midi. Le Figaro – 12 mars 1910

uk Mésaventures du roi du coton - Manchester, 11 mars - La Bourse du coton a été, cet après-midi, le théâtre d'une scène aussi violente qu'inaccoutumée. Un multimillionnaire américain, M. A. Patten, plus connu de l'autre côté de l'Atlantique sous le nom de roi du coton, a eu la malencontreuse idée de profiter de son passage dans notre ville pour aller faire un tour à la Bourse où il se fit présenter par un ami. A peine son nom avait-il été prononcé que des cris hostiles éclatèrent de toutes parts. Le roi du coton, peu habitué sans doute à un pareil accueil, n'était pas encore revenu de sa surprise, qu'une violente bousculade se produisait et qu'il était jeté dehors. Désireux d'éviter des horions, il descendit au pas de course les degrés de l'édifice et gagna la rue, mais là un accueil aussi peu sympathique l'attendait. La foule, ne sachant à qui elle avait affaire, l'entoura bientôt, menaçante. Affolé, M. Patten se réfugia dans une boutique, d'où il ne put sortir sain et sauf que grâce à la protection de la police. Les boursiers de Manchester lui reprochent ses accaparements et les fluctuations par trop accentuées qu'il fait, à son gré et dans son seul intérêt, subir aux cours. Le Petit Parisien – 12 mars 1910

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