19 mars 10
Les actualités du 19 mars 1910
Violente rixe entre ouvriers à Levallois – 4 personnes blessées par balles
Depuis quelque temps, une grève partielle avait éclaté pour une question de salaires, à la Société anonyme des Papeteries de Levallois-Clichy dont les ateliers sont 4, rue du Port, à Clichy-Levallois. Les ouvriers restés en minorité partisans du travail étaient en butte aux moqueries et aux traçasseries de leurs camarades en grève. Ces jours derniers, le conflit s'accentua et plusieurs des non grévistes furent même molestés assez gravement à la sortie des ateliers. Aussi les autorités avaient-elles pris la précaution de faire accompagner les ouvriers par des gendarmes et des gardiens la paix.
Hier soir, les ouvriers sortant de l'usine avaient été sectionnés en diverses fractions. Le dernier groupe composé d'une trentaine d'hommes, effectuait son départ, vers sept heure un quart, escorté par un gendarme et quatre agents lorsque, arrivée au carrefour formé par les rues Fournier, Pasteur et de l'Avenir, la petite colonne se heurta à une masse compacte de deux cents grévistes qui l'attendaient au passage.
Ceux-ci s'élancèrent sur leurs camarades et les attaquèrent. Une mêlée confuse, s'ensuivit Non contents de frapper à coups de pied et de poing les grévistes s'armèrent de revolvers et tirèrent sur leurs adversaires. Une centaine de détonations crépitèrent parmi les cris de rage des uns et de terreur des autres. Les glaces de la devanture d'un débit de vins, situé en face du théâtre de la rencontre furent littéralement criblées par les balles. Quatre femmes, des ouvrières de l'usine qui s'étaient réfugiées dans le débit, furent atteintes, deux d'entre elles assez grièvement.
Bientôt, effrayés eux-mêmes à la vue de l'attentat qu ils venaient de commettre, les grévistes tournèrent le dos et s'enfuirent. Le premier émoi passé, on constata que les deux agents Melin et Coureau avaient été blessés chacun à un bras, mais leur état n'étant pas inquiétant, ils purent être ramenés à leur domcile. En peu d'instants, le terrain de la bagarre avait été abandonné par les deux partis et personne heureusement n'avait été tué. On craint toutefois qu'il n'y ait d'autres blessés, parmi les grévistes qui, tirant au hasard, ont pu, dans ces conditions, s'atteindre entre eux.
M. Lépine, préfet de police, a chargé M. Laurent, secrétaire général, de se rendre à Clichy auprès des agents blessés et de leur remettre des médailles d'honneur décernées par le ministre de l'Intérieur. M. Laurent a en même temps arrêté, de concert avec le commissaire de police de Clichy, les mesures d'ordre à prendre pour la journée d'aujourd'hui.
Le Petit Journal – 19 mars 1910
EN BREF
Double suicide sous un train - Troyes, 18 Mars. Ce matin, à 6 heures 35, entre les stations de Saint-Mesmin et de Savières, le nommé Pitois, sellier aux ateliers de l'Est à Romilly-sur-Seine, et sa femme se sont jetés sous les roues du rapide Paris-Belfort qui les a mis en pièces. Les débris des corps des malheureux ont été ramassés sur un parcours de plus de 200 mètres. Pitois était trésorier de la Société de secours mutuels des ateliers de l'Est à Romilly. Il avait détourné au préjudice de cette société une somme de plus de 8.000 francs. Il était en fuite depuis trois jours. Le Petit Journal – 19 mars 1910
Trois mineurs asphyxiés - Montceau-les-Mines, 18 Mars - Un terrible accident s'est produit, cette nuit, vers 2 heures, aux mines de Blanzy. Trois ouvriers, Jean-Marie Jondeau, 46 ans, mineur, demeurant à la Croix-des-Oiseaux; Jean-Marie Labeaupin, 20 ans, manœuvre, à Saint-Vallier, et Emile Guittat, 20 ans, manoeuvre, rue de Moulins, travaillaient au puits Saint-Pierre, dans une galerie à roches, dite de la Charbonnière.Un coup de mine s'est produit et les trois ouvriers ont été asphyxiés par les gaz délétères qui se sont dégagés. Les corps des malheureuses victimes, remontés, peu après, ont été transportés à l'hôpital des Mines. Cinq chevaux, qui se trouvaient dans ce même endroit, ont également péri. Le Petit Journal – 19 mars 1910
Mort mystérieuse de la comtesse Zanardi - Naples, 18 Mars - La haute
société de Naples est sous le coup d'une violente émotion provoquée par la
nouvelle de la mort mystérieuse de la comtesse Zanardi. Le valet de chambre de
la comtesse, nommé Spina, aurait essayé de soudoyer le concierge du palais
habité par Mme Zanardi en déclarant qu'il était son héritier. Le portier prévint
immédiatement la police. Celle-ci se rendit aussitôt au palais Zanardi et trouva
le cadavre de la comtesse sur lequel on releva des traces de violence. Le valet
de chambre Spina, qui n'avait prévenu personne du décès et s'était emparé de
l'argent et des valeurs de la morte, a été aussitôt mis en état d'arrestation.
Le Petit Journal – 19 mars 1910