Les actualité du 15 janvier 1908
Effroyable incendie aux Etats-unis – 150 morts
New-York, 14 janvier — Un terrible incendie, qui a causé la mort d'environ cent cinquante personnes, a détruit, la nuit dernière, l'Opéra de Boyertown, petite ville de l'Etat de Pensylvanie qui compte quelques milliers d'habitants. La salle d'opéra occupait le premier et le deuxième étages d'un petit bâtiment, dont le rez-de-chaussée était pris par des magasins. C'est certainement à ce fait ainsi qu'au manque de portes de dégagement qu'on doit d'avoir enregistré la mort d'un si grand nombre de personnes.
Une représentation, donnée par des amateurs au profit d'une oeuvre de bienfaisance, avait lieu. La salle, dont la contenance est d'environ quatre cents personnes, était archibondée, lorsque, subitement, les pellicules d'un cinématographe qu'on, faisait fonctionner au cours des entr'actes prirent feu. Avant qu'on ait pu prendre les mesures nécessaires pour arrêter ce commencement d'incendie, les flammes atteignaient le réservoir à gaz servant à faire fonctionner le cinématographe. Ce réservoir explosait en même temps qu'une gerbe de flammes s'élevait, jetant la panique parmi le public.
Les acteurs amateurs qui prenaient part à la représentation essayèrent alors de rassurer la foule. Ce qu'ils firent dans ce but eut un résultat désastreux car en se précipitant tous ensemble pour prononcer quelques mots engageant le public à rester calme ils renversèrent les lampes à pétrole qui servaient à éclairer la scène. La chute des lampes ne devait comme l'assurent plusieurs survivants, qu'activer davantage la violence de l'incendie.
Les scènes qui se déroulèrent ensuite furent effroyables. Les flammes atteignirent immédiatement une grande hauteur, une fumée épaisse commença en même temps à envahir la salle. Affolés, en proie à une terrifiante panique les spectateurs se précipitèrent vers les portes de sortie. Il s'ensuivit une bousculade effroyable au cours de laquelle des hommes des femmes et des enfants se battaient sauvagement pour conquérir le droit de passage. Les plus faibles étaient violemment écartés des portes par les plus forts, et le plus souvent jetés à terre et foulés aux pieds. Un grand nombre de femmes et d'enfants ont certainement péri de cette manière, suffoqués ou écrasés par une foule en délire.
Les portes de dégagement étaient, hélas ! trop peu nombreuses. Aussi de nombreux spectateurs afin d'échapper aux flammes qui faisaient des progrès rapides, n'hésitèrent-ils pas à sauter des fenêtres du théâtre dans la rue. Beaucoup d'entre eux se blessèrent plus ou moins grièvement dans leur chute. Plusieurs même se tuèrent sur le coup. Pour comble de malheur, la pompe à incendie de Boyertown se trouva hors d'état de fonctionner et, lorsque les pompiers de Pottstown, auxquels on avait fait appel, arrivèrent sur les' lieux, le théâtre n'était plus qu'un vaste brasier.
Des trains spéciaux transportant des médecins et des infirmiers furent envoyés de Pottstown et de Reading immédiatement après la catastrophe. Toutes les maisons avoisinant le théâtre étaient transformées en ambulances provisoires. Des blessés, dont on ignore encore le nombre exact, y reçurent les soins que comportait leur état. On rapporte que des familles entières ont disparu. Cet incendie plonge dans la consternation tous les habitants de Boyertown dont la population s'élève à 2.500 personnes environ.
On mande de Boyertown aux journaux que le spectacle d'aujourd'hui est sinistre. Une foule affolée, parmi laquelle les femmes sont en majorité entoure le théâtre, où proches et amis ont péri. La police aidée par un comité volontaire de citoyens, a fort à faire pour les empêcher d'approcher trop près des ruines fumantes. Une femme, dont tous les enfants ont été brûlés, ne put que très difficilement être empêchée de se jeter dans la fournaise. Soixante-quinze personnes, estime-t-on ont péri dans les flammes. Une vingtaine sont mortellement atteintes. Durant la journée une demi-douzaine ont succombé à leurs blessures.
Un père qui avait réussi à sortir de la salle, emportant son enfant âgé de quatre ans, s'aperçut que les deux issues du théâtre étaient encombrées par une foule terrifiée qui rendait le passage impossible. Il n'hésita pas à lancer son enfant dans la rue d'une des fenêtres de l'Opéra, située au deuxième étage. Le malheureux bébé tomba sur le balcon du premier étage, d'où les pompiers, qui avaient appliqué des échelles de sauvetage le long des murailles le retirèrent légèrement blessé.
Une dépêche de Boyertown au New York Sun annonce ce soir que le nombre des victimes de la catastrophe dépassera probablement cent cinquante. Cent quarante-quatre cadavres ont déjà été retirés des ruines de l'Opéra au cours des travaux de déblaiement entrepris aujourd'hui. Quoique la plupart soient effroyablement mutilés et carbonisés, cinquante-neuf d'entre eux ont pu être identifiés. Le nombre des blessés est de soixante-quinze.
Le Matin – 15 janvier 1908
EN BREF
Un drame en Loire - Un cultivateur de Varades, Joseph Robin, avait conçu le projet de conduire chez lui sa mère, qui habitait Saint-Florent, afin de la soigner lui-même, car la pauvre vieille, âgée de soixante-sept ans, était infirme. Pour cela il l'avait embarquée et assise sur une chaise dans son bateau, où il avait également placé son petit mobilier. Robin dirigeait le bateau, tandis qu' un ami nommé Giraud le tirait du rivage avec une corde. Tout à coup, Robin s'aperçut que le bateau faisait eau. Comme il allait contre le courant, par conséquent très lentement, Robin cria à Giraud de lâcher la corde afin d'aller à la dérive et de tacher d'accoster sur une île située un aval, a peu de distance. Vain espoir: le bateau enfonçait toujours, et bientôt Robin se jeta à la nage pour l'alléger et se sauver. Quelques instants après le canot était englouti, et Robin, qui avait réussi à atteindre l'ile, assistait à l'agonie de sa mère qui se cramponnait aux épaves et poussait des cris navrants. Puis la pauvre femme disparaissait devant les yeux de son fils, fou de douleur impuissante. Le Temps – 15 janvier 1908
Déraillement de tramway mortel — Un train de tramways sur route de
Caen à Falaise dits chemin de fer du Calvados a déraillé dans une courbe à la
hauteur de Potigny (arrondissement de Falaise), Les voyageurs étaient au nombre
de quatorze, dont treize, affolés, prirent la fuite dans toutes les directions.
Un seul, légèrement blessé au visage par un éclat de verre, demeura auprès du
mécanicien et du chauffeur ensevelis sous les débris de la machine. Le
mécanicien avait les deux jambes écrasées. Transporté à la gare de Potigny, il
est mort au bout de deux heures. Le chauffeur a eu le pieds broyé. Le Temps –
15 janvier 1908