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CPA Scans
27 janvier 2009

Les actualités du 27 janvier 1909

Exécution de Danvers à Carpentras

Se conformant à la volonté du Parlement— qui est aussi celle de la majorité du pays— M. Fallières vient d'autoriser une nouvelle, exécution capitale. Entre quatre condamnés à mort, un à Paris, deux à Marseille, et un a Carpentras, il a choisi ce dernier comme le moins digne de pitié.

Remy Danvers, en effet, était un professionnel du crime. Ne à Zuytpeene, arrondissement d'Hazebrouck (Nord), il était le fils d'un forçat encore actuellement ou bagne. A l'age de vingt-deux ans, il avait déjà subi onze condamnations et il était déserteur des bataillons d'Afrique, lorsque au mois de mai 1907 il fut accepté comme valet de ferme par les époux Donat, fermiers à La Palud.

Le 1e février 1908. apprenant que ses patrons avaient réuni une petite somme, il tua d' abord Donat d'un coup de fusil, puis malgré les supplications de la femme qui implorait à genoux sa pitié, il la tua également. Ceci fait, il empaqueta les cadavres dans une toile d'emballage et il les portait au Rhône pour les y jeter lorsqu'il fut surpris et arrêté. Il fut condamné le 29 juillet à la peine capitale.

Cinq mois et demi s'étant écoulés depuis l'arrêt, Danvers croyait bien sa peine commuée. Il mangeait de bon appétit. Il engraissait. Cependant, il y a quelques jours, ayant appris, on ne sait comment l'exécution de Béthune, il devint inquiet et quand, dans la nuit de dimanche à lundi, il entendit des rumeurs et des cris venant de la place d'Inguimbert, qui est en face de la prison, il s'en émut et demanda ce qui se passait. On lui répondit que c'étaient des masques qui se rendaient à un bal et il se rassura. Quand, lundi matin, son avocat, Maître Maurice Fabre, vint le visiter, il le trouva fort tranquille.

Cependant les bois de justice étaient arrivés. M. Anatole Deibler avait débarqué avec ses aides lundi à midi et demi à la gare, au milieu d'une foule de curieux qui, rompant les barrages, l'avait forcé à se réfugier dans le bureau du chef de gare. On avait reçu d'Avignon, pour le service des Assises, un bataillon du 58e de ligne et de Tarascon un escadron du 11e hussards. Les mesures avaient été prises pour que l'exécution eût lieu le mardi matin. Les instructions, données par M. Lefébure, substitut du procureur de la République, portaient que la place serait complètement dégagée et que seules les personnes munies de cartes y auraient accès. Elles furent scrupuleusement observées, malgré les protestations des curieux accourus en foule et qui réclamèrent par de violentes clameurs. Cette place n'est pas grande, d'ailleurs. Elle ne mesure que 400 mètres carrés et il a été facile de l'isoler.

Comme à Bethune la guillotine avait été dressée tout près de la porte de la prison à gauche, entre le mur et un des grands arbres qui ombragent la place. De cette façon, le condamné, qui, en sortant, regarde tout naturellement on face de lui, ne voit rien et n'aperçoit l'instrument fatal qu'au moment où on le plaque sur la planche à bascule.

Dans la prison sont entrés MM. Gros, procureur de la République ; Lefébure, substitut ; Delbarre, sous-préfet; Verdale, juge d'instruction ; Barron, greffier ; de Clavel et Boyer juges; le docteur Marcellin, médecin de la prison; l'abbé Perbet, vicaire de Saint-Siffrein remplaçant l'aumônier malade, enfin Maître Fabre le défenseur du condamné. A six heures vingt, on leur ouvre la porte de la cellule. Danvers est réveillé. La tôle appuyée dans ses mains, il écoute le procureur qui d'une voix émue, lui annonce le rejet de son recours en grâce, et, comme le sous-préfet l'engage à être courageux : Je le serai, répond-il ; d'ailleurs les cris du dehors m avaient déjà prévenu.

Il de lève, boit un verre de rhum, trinque avec son défenseur et demande à entendre la messe. Pendant que l'abbé Perbet dit les prières. Danvers fume cigarette sur cigarette. On passe dans le bureau du gardien-chef car on procède à la toilette. Elle est rapide, car les condamnés ont toujours d'avance les cheveux ras et on a besoin que d'échancrer le col de la chemise. Pendant la toilette, Danvers récrimine : La justice n'est pas juste en France dit-il. Il y en a qui ont fait grâce et d'autres qui paient pour les coupables. Vous demandez bien pardon à dieu et aux hommes de ce que vous avez fait ? Lui demande l'abbé Perbet . — Oui. répond Danvers.

II est sept heures, la grande porte de la prison s'ouvre. Les magistrats sortent les premiers. Puis apparaissent le greffier, l'abbé Perbel et le condamné soutenu par deux aides. Danvers est livide, ses yeux effarés semblent chercher dans le lointain quelque chose d'inconnu. L'abbé Perbet l'embrasse; les deux aides le font brusquement tourner sur place et le poussent sur la bascule. Deibler tire fortement la tête pour bien l'engager avant de rabattre la lunette. Puis on entend un coup sourd et la tête tombe. L'exécution a duré trente secondes. A ce moment, des fenêtres qui donnent sur la place et des toits sur lesquels, malgré le temps brumeux et le vent glacial, sont grimpés obstinés curieux, partent quelques coups de sifflets. Mais ils n'ont aucun écho.

La tête réunie au corps dans le panier, le fourgon, escorté par les gendarmes à cheval, a été dirigé sur l'hôpital où l'autopsie a été faite par le docteur Marcellin assisté de plusieurs de ses confrères de Carpentras. Ils espèrent, paraît-il, un résultat intéressant en raison des dimensions du crâne du supplicié. Il n'y avait pas eu d'exécution à Carpentras depuis le mois de mars 1888, époque où la guillotine s'était dressée pour Guinoux, coupable d'un crime semblable à celui de Soleilland.

Le Figaro – 27 janvier 1909

La double exécution d'Albi

 

EN BREF

Cartes postales tricolores - Vendredi dernier plusieurs marchands de cartes postales illustrées ont comparu devant le tribunal correctionnel de Metz pour avoir mis en vente des cartes aux trois couleurs françaises. Ces cartes représentaient au premier plan une Alsacienne, au second plan la cathédrale de Strasbourg, et au fond, dans un nuage tricolore, des troupes françaises montant à l'assaut des remparts de la ville. L'accusation était basée sur une loi française du 11 avril 1848, mais le procureur dit qu'il considérait qu'il ne s'agissait là que d'un enfantillage politique auquel il n'accordait pas grande importance, et le tribunal fit preuve de bon sens en acquittant les prévenus. Le Temps - 27 janvier 1909

Parricides - A Trébry (Cotes-du-Nord), Raymond François, soixante-cinq ans, ancien cantonnier, a été, au cours d'une dispute, tué par ses enfants, âgés de vingt-trois et dix-huit ans. L'aîné a terrassé le vieillard, puis l'a maintenu à terre pendant que le plus jeune l'assommait à coups de talon de botte, ils ont ensuite transporté le cadavre de leur père dans un puits voisin et l'y ont jeté. Les deux parricides ont été arrêtés. Le Temps - 27 janvier 1909

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