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17 novembre 2010

Les actualité du 17 novembre 1910

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Tolstoï est mort

Leon Tolstoi

russie

A quatre-vingt-deux ans, après un geste suprême et passionné vers la solitude, Léon Tolstoï est mort hier clans une gare, parmi le va et vient des inconnus. On se rappelle le désespoir des siens, ce matin du 11 novembre dernier, où la comtesse Léon Tolstoï, au lieu du mari qu'elle adorait, ne trouva plus dans la maison de Yasnaïa-Poliana qu'une lettre où le grand écrivain disait sa volonté de fuir, de ne jamais revenir vers la vie. Le lendemain, on le découvrait dans un monastère, à environ 250 kilomètres au sud-ouest de Moscou. Il quitta ce monastère pour rentrer à Moscou et tomba malade dans le train. Il descendit pour se faire soigner à la station d'Astapovo, où il vient de mourir.

C'était peut-être le plus grand nom littéraire de l'Europe. Nul ne fut plus passionnément admiré. On recueillait ses écrits avec une émotion religieuse; on suivait avec respect tous ses gestes. Aucun petit sentiment n'habitait cette grande âme. Aussi est-il impossible de la juger à la commune mesure humaine.

Né en 1828 dans la province de Toula, Léon Tolstoï fut orphelin très jeune, et ce furent deux de ses tantes qui l'élevèrent. Au sein de cette calme et un peu mélancolique nature de Yasnaïa-Poliana, son enfance s'écoula, calme, un peu mystique, un peu triste aussi ; mais de ces années vécues par les champs et par les bois, il garda à la nature une tendresse qui ne se démentit pas jusqu'à ses derniers jours. Aussi, ses études universitaires terminées, revint-il s'installer dans son modeste domaine de Yasnaïa-Poliana. Il ne devait toutefois y faire qu'un séjour assez bref, et en 1851 il s'engageait comme officier dans les troupes du Caucase.

C'est à cette époque que s'éveilla sa vocation d'écrivain et qu'il fit paraître les Cosaques, Enfance (1852), Adolescence (1854). Puis survint la guerre de Crimée, et le Jeune officier fut de ceux que l'on désigna pour aller défendre Sébastopol contre les troupes franco-anglaises. De ses impressions pendant ce siège terrible il nous a laissé des tableaux où s'affirme déjà sa maîtrise d'observateur et d'écrivain : Sébastopol en 1854 ; Sébastopol en mai 1855 ; Sébastopol en août 1855.

Mais les horreurs de la guerre avaient fait naître dans son cœur si largement ouvert à la pitié le dégoût du métier des armes. A la conclusion de la paix, il donna sa démission et alla chercher en Allemagne, en France, en Suisse l'oubli des scènes d'effroyable misère humaine dont il venait d'être le témoin. Rentré à Yasnaïa-Poliana, il s'y recueillit longuement, car sa pensée subissait à cette époque une modification profonde et définitive. Le littérateur sentait naître en lui l'apôtre.

Ce fut de ces méditations que sortit Guerre et Paix. De la création de cette œuvre magistrale, épique dans certaines pages, Tolstoï se délassa en écrivant, pour les simples et pour les petits, pour les paysans et pour les enfants, de petits contes et des livres d'école. Quelques années plus tard, en 1875, il publia son émouvant roman d'Anna Karénine, où point déjà sa pitié pour la femme que l'amour a détournée du droit chemin et que nous retrouverons plus tard dans Résurrection.

Mais pour quelque temps, le romancier va céder la plume à l'écrivain religieux et mystique. En quoi consiste ma foi ? Que doit-on faire ? Telles sont les questions que se pose, mais ne parvient pas à résoudre, l'ermite de Yasnaïa-Poliana. Cette crise de mysticisme, latente depuis toujours d'ailleurs au fond de l'âme de Tolstoï, nous en retrouvons les traces dans ses productions littéraires ultérieures : la Mort d'Ivan Ilitch, Puissance des ténèbres, la Sonate à Kreutzer, Maitre et Serviteur, enfin et surtout dans son magistral roman de Résurrection.

Avant de rentrer dans le néant, Tolstoï a voulu jeter un dernier appel à la fraternité humaine. Cet appel il l'a lui-même appelé Ultimes paroles. En voici la conclusion: Avant tout, arrêtons-nous au milieu de chacune de nos occupations et de chacun de nos plaisirs et demandons-nous ; Faisons-nous tout ce que nous devons ou bien dépensons-nous inutilement cette vie qu'il nous est donné de passer entre deux-étreintes de néant ? Voilà ce que je tenais à rappeler a mes semblables avant de retourner dans l'infini. Tolstoï mort, ce n'est pas seulement un grand esprit qui disparaît : c'est un moment de la conscience humaine qui entre dans l'Histoire.

Le Matin – 17 novembre 1910


EN BREF

AstronomieEclipse de lune - Les Parisiens savaient, qu'ils pourraient contempler, cette nuit, de dix heures cinquante du soir à deux heures sept minutes du matin, une éclipse totale de lune. Point ne fut besoin de braquer de jumelles sur le ciel, le phénomène était visible à l'œil nu. La soirée était belle, favorable aux promenades, et la lune se présentait dans le ciel aux regards des observateurs très nombreux. Aussi chacun s'arrêtait-il de temps en temps, le nez en l'air, pour voir l'ombre entamer progressivement le disque lunaire. Malheureusement, vers dix heures et demie, le ciel se couvrit et des nuages vinrent voiler la lune. Vers onze, heures, fidèle au rendez-vous annoncé, la terre est venue entamer de son ombre l'extrémité gauche de la lune, le phénomène, vu à travers les interstices des nuages, a pu encore être observé avec intérêt. Le temps sombre n'a pas permis malheureusement aux observateurs non professionnels de se rendre compte de la diminution de clarté provenant du progrès que faisait l'ombre de la terre sur la lune. Les astronomes en permanence à l'Observatoire et à la Tour Saint-Jacques ont été plus heureux que les profanes ; grâce à leurs puissants appareils, ils ont fait de curieuses observations qu'on connaîtra bientôt. Le Petit Journal – 17 Novembre 1910

Curieuse découverte d'un Stradivarius - Strasbourg, 16 novembre. —Un stradivarius authentique qui court la rue, voilà qui ne se voit pas tous les jours. Un violoniste passait hier sur une place publique de Strasbourg, quand il avisa un bambin qui jouait au charretier, traînant derrière lui un violon rempli de sable. La boîte, secouée par les cahots, se vidait petit a petit, et lorsqu'elle était vide, le bambin la remplissait à nouveau. Intrigué, le violoniste s'approcha, prit l'instrument et reconnut un stradivarius. Il l'acheta à la mère de l'enfant au prix de huit francs, et la brave femme fut sur le point de s'excuser de vendre si cher une pareille machine. Le Matin – 17 novembre 1910


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