Les actualité du 7 décembre 1910
Un Violent engagement dans le Ouadaï - Trois officiers tués
De douloureuses nouvelles sont arrivées hier soir de l'Afrique équatoriale.
Un bref télégramme parvenu au ministère des colonies, via Dakar, annonce qu'un
grave engagement a eu lieu, le 9 novembre dernier, aux environs de Drijelé,
capitale du Massalit. (Afrique équatoriale). Le lieutenant- colonel Moll,
commandant du territoire militaire du Tchad, le lieutenant Jolly et le sergent
Balle ont été tués. Notre colonne de tirailleurs a été attaquée par les forces
réunies, et supérieures en nombre du sultan du Massalit et de Doudmourah,
ex-sultan du Ouadaï.
Cette attaque a été; dit la dépêche, vivement repoussée. L'ennemi s'est enfui en laissant sur le terrain de nombreux morts parmi lesquels le chef Taguidin Doudmourah a été blessé, ainsi qu'un grand nombre de ses partisans. Mais, de nôtre côté, nos troupes ont éprouvé des pertes assez sensibles, au sujet desquelles le ministre des colonies a demandé par cablogramme des indications précises. Le lieutenant-colonel Moll, le lieutenant Jolly et le sergent Balle ont été tués. Ainsi se poursuit, sans arrêt, la lutte entre notre autorité et celle des chefs de pillards de la région qui s'étend à l'est du Tchad.
Voilà plus de deux ans que le Sultan du Ouadaï, Doudmourah, est en guerre avec nous. En mars 1908, il venait nous attaquer sur la Batha jusqu'à Dogotchi et Djouah. En noyembre 1909, un rezzou du Borkou pénétrait jusqu'à Ouachenkalé, dans le Kanem, et nous enlevait un troupeau de chameaux. Puis nos troupes et celles de Doudmourah se livraient un violent combat à Birket-Fatmé.
Cependant, le 2 juin 1909, le capitaine Fiegenshuh, à la tête d'une troupe vaillante et hardie, pénétrait dans la capitale du Ouadaï, Abecher, et prenait possession de tout le sultanat. Malheureusement, le capitaine Fiegenshuh était attiré dans un guet-apens que lui tendait, le 4 janvier 1910, le chef Taguidin du Dar Massalit, aux environs de Bir-Taouil, et il était traîtreusement massacré avec le lieutenant Delacommune, le lieutenant Vasseur, le maréchal des logis Breuillac, le sergent Besanger et 150 tirailleurs qui l'accompagnaient.
Mais nos troupes devaient prendre leur revanche. Enhardi par le succès de son allié Taguidin, le sultan Doudmourah, appuyé par le sultan du Dar-Four et les Senoussis de Koufra, essaya à plusieurs reprises d'envahir, le Ouadaï Le 7 avril 1910, il se heurta au capitaine Chauvelot qui lui infligea une sanglante défaite à Guereda. Quelques semaines après, les troupes de notre protégé Acyl achevaient la déroute de nos ennemis.
A la suite de ces faits, nos effectifs avaient été renforcés dans la région et portés de 1,200 hommes à 1,600 hommes et deux compagnies de méharistes furent placées, l'une à El-Zigueï au nord de Kanem, et l'autre à Arada, au nord du Ouadaï. Le lieutenant-colonel Moll se rendait en outre en personne dans la région, pour y asseoir définitivement notre suprématie. L'engagement qui vient d'avoir lieu avec nos irréconciliables ennemis montre que ceux-ci n'ont pas désarmé et qu'il est nécessaire d'en finir une fois pour toutes avec eux.
Le Figaro – 7 décembre 1910
EN BREF
Un voyage mouvementé en sphérique - Un ballon allemand qui s'éleva samedi matin de Munich pour se rendre en Suisse, a atterri hier matin à Waterfield, près de Kirkwall (îles Orcades), après avoir traversé la mer du Nord, poussé par un fort vent du sud-est. Ce voyage a été malheureusement marqué par un douloureux accident. Dimanche matin le ballon commença à tomber. Pendant une des brusques descentes de l'aérostat, un des passagers, M. Netzger, tomba à la mer et se noya. Le ballon délesté s'éleva et put continuer sa route pendant toute la journée de dimanche. Ce n'est que lundi, à 9 h. 30 du matin, après avoir souffert de longues heures du froid et de la faim, que les deux aéronautes survivants aperçurent le phare de Berstane, près de Kirkwall. Ils avaient parcouru depuis leur départ une distance d'environ 1,600 kilomètres. Le Temps – 7 décembre 1910
La question des langues divise la Belgique - Bruxelles, 6
décembre — La question des langues, pendante depuis des années en Belgique,
menace de devenir de plus en plus irritante. Le parti flamingant se fait chaque
jour de plus en plus exigeant et désagréable pour les Wallons. Après avoir
obtenu des juges flamands la flaminganisation des noms des villes, des pièces de
monnaie, l'enseignement du flamand aux degrés primaire et moyen ainsi que
l'imposition du flamand à la plupart des employés et fonctionnaires de l'État et
enfin jusqu'à la traduction de la devise nationale, voici qu'ils entendent
transformer maintenant la vieille université de Gand. Cette prétention a soulevé
les protestations de professeurs influents de l'université eux-mêmes, mais rien
n'arrête les flamingants. Et cet après-midi, à la Chambre belge, leurs exigences
ont soulevé les violents reproches de toutes les fractions du Parlement.
Quelques-uns de ces messieurs en effet avaient imaginé d'insérer dans l'adresse
en réponse au discours du trône une déclaration en faveur de la transformation
de l'université de Gand; et pour comble, ils s'étaient mis à développer leur
thèse en flamand. Les députés wallons protestèrent, et M. Desprès, un de nos
littérateurs les plus appréciés, appuyé par la majorité, s'éleva contre le
système proposé qui provoquerait infailliblement la séparation administrative du
pays. Avec force, il affirma que la culture de la langue française devait être
prépondérante. Cette déclaration souleva de vives protestations, mais finalement
les flamingants n'obtinrent que 7 voix contre 118 et 31 abstentions. Le Matin
– 7 décembre 1910