Les actualité du 14 mai 1910

      

L'aviateur Hauvette-Michelin se tue au meeting de Lyon

Lyon, 13 mai — Les très beaux vols d'aujourd'hui se sont malheureusement terminés par un terrible accident. A six heures trois quarts, après la clôture officielle, M. Hauvette-Michelin amena sur la piste son monoplan Antoinette. Il monta sur le siège, mît le moteur en marche et l'appareil partit. Le monoplan s'enleva pendant quelques mètres, puis revint à terre et se mit à rouler. Il continua, tantôt roulant, tantôt s'enlevant à trois ou quatre mètres de hauteur ; soudain l'aéroplane heurta un pylône en bois, surmonté d'une boule, qui marque l'angle de la piste. Le pylône tomba sur la tête de M. Hauvette-Michelin qui fut renversé inanimé sur son siège.

On se précipita au secours du malheureux aviateur qui fut transporté à l'ambulance de l'aérodrome où l'on reconnut que son état était très grave sinon désespéré. M. Hauvette-Michelin avait en effet une fracture de la base du crâne. Il fut transféré à huit heures et demie à l'hôpital Saint-Luc, où on lui fît subir l'opération du trépan. A dix heures vingt, l'infortuné expirait:

M. Hauvette-Michelin était le neveu du grand fabricant de pneumatiques de Clermont-Ferrand : il était âgé de vingt-six ans. Nous nous étions, il y a deux jours, entretenu avec Hauvette-Michelin. Ce grand jeune homme, toujours très calme, engoncé dans une fourrure qui lui cachait presque la tête, chaussé de leggins, s'apprêtait à faire des choses intéressantes. La veine ne lui avait jamais souri. A Héliopolis, où il avait été engagé, il n'avait pu figurer dans les différentes épreuves qui avaient été disputées. Il était venu à Lyon dans l'espoir de pouvoir décrocher enfin le brevet de pilote aviateur, qu'il espérait passer hier soir.

Que voulez-vous ! nous avait-il dit. J'attends des jours meilleurs. Le moteur de mon appareil ne peut arriver à être mis au point. J'attends, ajouta-t-il, avec un sourire un peu désabusé. Je voudrais bien faire un changement et placer sur cet appareil, vraiment étonnant, un moteur de tout repos. Mais cela me demanderait un mois, et un mois d'inaction, pour un aviateur, c'est beaucoup ! Lundi dernier, ayant démoli son appareil à Lyon-Aviation, Latham proposa à Hauvette-Michelin de lui prêter un monoplan qui n'était pas encore sorti ; mais celui-ci refusa poliment. Son désir de planer dans les airs ne lui porta pas chance !

Le Matin – 14 mai 1910

EN BREF

M. Loubet renversé par une automobile - M. Emile Loubet, ancien président de la République, a été, hier matin, victime d'un accident qui heureusement, n'a eu aucune suite grave. Comme il passait à pied sur le pont Neuf, vers onze heures, à l'angle du quai des Grands-Augustins, à l'endroit où Curie trouva la mort, il s'avança sur la chaussée. A ce moment arrivait une automobile qui l'évita par un détour. Malheureusement une seconde automobile suivait Son conducteur ne vit pas M. Loubet qui, n'ayant pu se garer, fut heurté et renversé sur le sol. M. Loubet se releva sans aucun mal et rassura les passants qui s'étaient portés à son secours. L'un d'eux, M. Gaillard, conseiller général du Calvados, offrit alors sa voiture à l'ancien président et le reconduisit chez lui, 5, rue Dante. Prévenus aussitôt, nous avons fait prendre des nouvelles de M. Loubet, et son fils, M. Paul Loubet, nous a pleinement rassurés. Son père, nous a-t-il dit, n'a reçu qu'une très légère éraflure à la main, et l'accident est sans conséquence. Le Matin – 14 mai 1910

Une conquête électorale des femmes norvégiennes - Christiania, 13 mai — L'Odelsthing, corps législatif du Storthing, a décidé ce soir, par 71 voix contre 10, d'accorder le droit de vote aux femmes en matière municipale. D'après la nouvelle loi, toute femme âgée de vingt-cinq ans et pouvant faire la preuve de cinq ans de séjour dans la commune, est de plein droit électeur et éligible aux fonctions municipales. Mme Gina Krog, habile propagandiste féministe, explique que si toutes les femmes usent de leurs droits, leur nombre sera de 14 % plus important que celui des hommes. Le Matin – 14 mai 1910

Fils et petits fils de suicidés, il se suicide aussi - Londres, 12 mai - Les journaux du soir signalent le suicide, à Longton, d'un individu nommé Reuben Grocott, âgé de trente-sept ans, qui se pendit dans un accès de désespoir. Fait des plus curieux le père, la mère, le grand-père et la grand-mère de Reuben Grocott se sont tous suicidés. Le Matin – 13 mai 1910